EDITION N°1

affiche-cathyberberian


Autour de Cathy Berberian 1925 – 1983

concert 6 mai 2014, 19h, auditorium Joseph Jongen

Conservatoire royal de Bruxelles

Coordination : Juliette Donadieu & Christian Debauve

Régie lumière & vidéo : Nadir Babouri

 

Nous vous présentons ce soir des œuvres liées à Cathy Berberian. Des œuvres qu’elle a écrites, des œuvres que l’on a écrites pour elle et puis une création qui se place dans une démarche similaire à la sienne.

 

Qui est Cathy Berberian ?

 

Pour ceux qui ne la connaissent pas, Cathy Berberian, est une chanteuse dont l’essentiel de l’activité artistique se déroule des années 50 aux début des années 80. Son goût de l’imitation associé à un sens de l’humour et à un désir d’expérimentation l’amène naturellement à franchir des barrières établies dans le milieu du chant lyrique et a inspiré de nombreux compositeurs. Elle a évolué en marge des grandes productions d’opéra qui faisaient des chanteuses ou chanteurs de vrais stars, et est pour cela moins connue.

 

« Stripsody »

 

Cathy Berberian est née aux Etats-Unis en 1925 et a grandit à une époque où les comic strips (Tarzan, Popeye, Superman…) sont en plein développement. Elle est très tôt attirée par les onomatopées qui s’y trouvent et aime à les imiter vocalement. Au départ, elle en avait réunie une centaine, en envisageant de les confier à un compositeur pour qu’il lui écrive une pièce.
C’est en commençant à les faire vivre avec sa voix qu’elle réalise que son inventaire comprend déjà une musique. Encouragée par Umberto Eco, grand ami à elle, elle arrange son inventaire pour en faire cette Stripsody (rhapsodie de strip cartoon). Elle travaille d’abord avec un peintre (Eugenio Carmi) qui crée des sérigraphies à partir des sons qu’elle produit, et ce sont ses tableaux qui sont présentés sur scène lors de la création au festival de Brême en 1966. Associer musique et art graphique est une nouveauté pour l’époque.
Par la suite, lorsque Peters décide de publier la pièce, c’est le dessinateur Roberto Zamarin qui est chargé de réaliser la partition graphique. Comme le fait remarquer la biographe Marie-Christine Vila, cette pièce très originale et peu classique prend maintenant place après Bach, entre Beethoven et Berlioz sur les rayons des libraires.

 

Stripsody sera interprétée ce soir par Noriko Yakushiji.

 

« Morsicat(h)y »

 

La deuxième « trouvaille musicale » de Cathy Berberian se nomme Morsicat(h)y, elle est dédiée à Luciano Berio, à qui elle fut mariée. Le titre évoque le nom de l’auteur Cathy dont la lettre est traduite en morse (langage utilisé dans la pièce) ; morsicato (piqûre de moustique en italien) et mosquito (moustique en anglais)

Vous l’avez compris, il y a là une histoire de moustique… Il s’agit d’une pièce pour piano où la main gauche tente d’arrêter la course de la main droite représentant un moustique. Le moustique énonce un texte en langage morse que l’auteur lui a écrit. N’ayant pas la chance de recevoir une lettre de Cathy Berberian, Elise Toninato notre pianiste, utilisera le texte prévu par défaut :
« per antonio, ballista un ricordo di un pomeriggio di domenica destate coi simbolistia torino, con affetto e ammirazione da cathy » traduction : pour Antonio, en souvenir d’un dimanche après-midi réveillé par un symboliste de Turin. Avec affection et admiration de cathy

 

« Aria – John Cage »

 

Cathy Berberain a rencontré John Cage à Milan, lorsqu’elle y habitait avec Berio. Ils furent tout de suite très ami, se retrouvant dans un humour et une liberté commune. Cage, sans le sou gagnait sa vie en participant à un jeu télévisé sur les champignons… Il était fasciné par tous les sons et imitations humoristiques que produisait Cathy à tout bout de champ, et c’est ainsi qu’il écrivit pour elle cette Aria où la partition graphique demande au chanteur d’adopter des voix différentes avec un système de couleur.
René Covarrubias l’interprétera ce soir.

 

« Folk songs – Luciano Berio »

 

Le concert se poursuit avec les Folk Songs de Luciano Berio. Cet ensemble de 11 chants a été composé à la demande de Cathy par Luciano Berio. La plupart se trouvait déjà à son répertoire (c’est-à- dire qu’elle les chantait régulièrement en récital). Ces chants ont des origines très diverses : Etats- Unis, Arménie, France, Sicile, Sardaigne, Auvergne, Azerbaijan, etc.
Ils rendent hommage à l’intelligence vocale de Cathy Berberian (par la variété des voix utilisées) et dessinent une sorte de géographie personnelle : née de parents arméniens qui ont fui le génocide de 1915, elle est née aux Etats-Unis, puis est venue étudier en France et en Italie où elle rencontra Berio et fonda une famille…

Cathy Berberian et Luciano Berio n’avaient pas le même rapport à la musique populaire. Pour ce qui est de Cathy, c’est un lien affectif et culturel qui s’est développé dans sa jeunesse où elle dansait dans l’Armenien Folk Group de New York. Luciano Berio y voit plutôt un matériau, une source d’inspiration à intégrer dans ses compositions. Ici, l’instrumentation est importante, elle permet d’assurer une continuité entre ces chants, d’amener des sonorités folkloriques originales.
Trois chanteuses, Pauline Delannoy, Delphine Martens et Barbara Delagnes vous interpréteront ces chants sous la baguette de Pierre Quiriny.

 

« La Mouche – Jeremy Grynberg »

 

Il se trouve ici au conservatoire, un jeune étudiant en théâtre qui partage avec Cathy Berberian le goût de l’imitation sonore et du spectacle, et cela nous a paru important de vous le présenter ce soir : Jeremy Grynberg et son solo « la mouche »

 

« Credentials or « think, think lucky » »

 

La pièce qui va suivre n’a encore jamais été jouée en Belgique. Elle est écrite à partir du monologue de Lucky (extrait de la pièce de Samuel Beckett « En attendant Godot »). C’est le moment où Pozzo, maître de Lucky lui ordonne « pense, porc ! » et Lucky part alors dans un monologue absurde jusqu’à être interrompu du force par les autres personnages. Écrite en 1961 sur une commande de la radio de Baden-Baden, elle a fait l’objet de nombreux échanges de lettres entre le compositeur Roman Haubenstock-Ramati et Cathy Berberian, témoignant ainsi de la participation très active de Cathy Berberian au processus de composition. Comme la plupart des pièces écrites pour Cathy Berberian, elle utilise un système de notation très particulier et nécessitant une notice préalable. Elle se divise en stabile et mobiles, demandant aux instrumentistes une disponibilité proche de l’improvisation et à la chanteuse une virtuosité importante.
C’est Natasha Salles qui interprétera cette pièce, avec Pierre Quiriny à la direction.

 

Épilogue

Nous terminons ce concert avec une projection d’une vidéo de Cathy Berberian chantant « A ticket to ride » (arrangement de Louis Andriessen). Elle partageait son goût pour les Beatles avec sa fille Cristina Berio. Et elle les considérait comme de la musique contemporaine – représentant la jeunesse de l’époque.
http://www.youtube.com/watch?v=WLqVioiDldc&hd=1
« A ticket to ride -video »

source : Vila, Marie-Christine, Cathy Berberian, cant’actrice, Ed. Fayard, 2003

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